Le guide Enquêter sur le bois illégal fournit des instructions claires sur la façon dont n’importe qui peut jouer un rôle dans les enquêtes sur les chaînes d’approvisionnement du bois illégal. Il comprend des conseils détaillés sur les sources d’informations et outils qui peuvent être utilisés pour savoir si le bois est récolté, échangé ou vendu de façon illégale sur des marchés sensibles.
Le guide est disponible en Anglais, Français, Espagnol et Indonésien. Il peut être téléchargé et imprimé comme fichier pdf illustré ou lu directement sur le site Internet.
1. Introduction
[ii] TEREA/S-for-S/Topperspective. 2016. Evaluation of the EU FLEGT Action Plan (Forest Law Enforcement Governance and Trade) 2004-2014. Commissioned by the European Commission through the European Forest Institute, http://www.flegt.org/evaluation
2. L’exploitation illégale des forêts & la réponse
La diligence raisonnable constitue peut-être la différence la plus importante entre les deux lois. Les sociétés ont par-là l’obligation légale de suivre certaines procédures visant à minimiser le risque que le bois qu’elles importent soit d’origine illégale. Manquer à cette obligation est en soi un délit punissable et il n’est pas nécessaire aux fonctionnaires de l’État de prouver que le bois est d’origine illégale. Le niveau de preuve requis pour engager des poursuites est donc bien moins élevé pour le RBUE que pour la loi Lacey américaine. Cela signifie qu’un large éventail de preuves peut être utile pour faciliter la mise en œuvre et l’exécution.
Comme la loi Lacey, le RBUE porte uniquement sur des types précis d’infractions dans le pays d’origine. Ici, les infractions concernées sont celles qui vont à l’encontre de la législation gouvernant les droits d’abattage, les processus de récolte (tels que les contrôles environnementaux), les taxes liées à la récolte du bois ainsi que les contrôles commerciaux et douaniers propres au secteur. Contrairement à la loi Lacey, le RBUE comprend également les infractions liées aux droits d’utilisation et de tenure des populations locales affectées par l’exploitation forestière. Bien que RBUE s’applique à l’ensemble des pays membres de l’Union européenne, il incombe à chaque État membre de voter les lois nationales qui énoncent les sanctions à appliquer et de définir les organisations responsables de la mise en œuvre de la loi et celles chargées de la faire appliquer dans ses frontières. En mars 2016, de tous les États membres seule la Hongrie n’avait pas encore pris les mesures légales et réglementaires de base. Cela ne veut pas nécessairement dire que les autres pays appliquent tous la loi efficacement ou que les sanctions sont dissuasives, comme l’exige de RBUE. Dans de nombreux États membres, les peines maximales applicables en vertu du RBUE sont importantes. Mais à ce jour, le volet interdiction n’a donné lieu à aucune poursuite, et aucune sanction n’a été appliquée pour manquement à l’obligation de diligence raisonnable. Des dossiers intéressants sont néanmoins en cours concernant l’obligation de diligence raisonnable du RBUE. L’un concerne une société néerlandaise au sujet d’importations de bois de sciage tropical en provenance du Cameroun. L’autre concerne une société suédoise pour l’importation de teck venant du Myanmar, vendu via la Thaïlande. Le premier dossier a été ouvert sur la base de preuves obtenues par une ONG.3. Comment la société civile peut aider à lutter contre le bois illégal
4. Comprendre la chaîne d’approvisionnement
5. La récolte
Dans cette section, les termes « droit de récolter » et « infractions opérationnelles » sont utilisés respectivement pour faire référence à ces deux notions.
Derrière ces principes, il existe toute une typologie de l’illégalité, qui reflète les nombreuses obligations qui sous-tendent les droits de récolte. Dans quasiment tous les pays, les divers aspects de la récolte sont gouvernés par des processus complexes de permis qui vont bien plus loin que la simple question de savoir si la coupe des arbres est autorisée. Il existe des règlementations visant à assurer que l’État ne subit pas de pertes, que les dommages environnementaux sont atténués, que les communautés profitent de l’exploitation et que les essences protégées ne sont pas récoltées. La violation d’un seul de ces aspects du régime de récolte peut rendre illégal le produit d’une zone donnée. Bien que les forêts qui approvisionnent le marché mondial du bois s’étirent d’un bout à l’autre de la planète, les processus d’autorisation et les façons de les enfreindre présentent davantage de similarités que de différences. Les évaluations d’impact environnemental sont, par exemple, une obligation fréquente pour les concessions que ce soit pour une exploitation sélective ou une coupe rase. Les concessions forestières pratiquant la « gestion durable des forêts » ont l’obligation de produire un plan de coupe annuel qui définit les zones dans lesquelles la récolte peut avoir lieu chaque année et les volumes pouvant être récoltés. Les sociétés qui exploitent le bois sont toujours redevables d’impôts. Cette section ne fournit pas un catalogue de toutes les obligations légales mais se concentre sur la description des infractions les plus fréquentes et sur les moyens de les détecter et d’en rendre compte. Ces typologies ne sont pas exhaustives mais fournissent une vue d’ensemble des pratiques illégales identifiées par la société civile en Asie, en Afrique, en Amérique latine et dans l’Extrême-Orient russe.Les activités d’exploitation dans les concessions destinées aux coupes sélectives et aux coupes rases sont normalement gouvernées par des plans d’aménagement forestier qui définissent les zones dans lesquelles le bois peut être récolté et sur quelle période. Ces plans définissent également d’autres contraintes légales conçues pour permettre une gestion durable de long terme. Ils définissent notamment les volumes maximum et les diamètres minimum des arbres pouvant être récoltés. Ces limites peuvent être violées de plusieurs façons. Par exemple, en prélevant des volumes plus importants, en abattant des arbres trop petits ou en exploitant des zones en dehors des limites établies par le plan. Pour éviter l’érosion du sol et la pollution de l’eau, il est souvent interdit de récolter du bois sur des terrains en forte pente ou près de cours d’eau mais ces pratiques illégales sont également courantes.La violation des termes d’autres permis Le droit de récolter est généralement étayé par des procédures et des permis supplémentaires, exigés par la loi et visant à atténuer l’impact de l’exploitation forestière sur l’environnement et les communautés locales. Souvent, ils ont pour objectif de permettre aux communautés de tirer des avantages directs de la présence des sociétés d’exploitation forestière ou de protéger leurs droits (bien que ces derniers ne soient pas entièrement reconnus par la loi). Les évaluations d’impact environnemental (EIE), qui obligent les sociétés à identifier et atténuer l’impact de leurs activités, font partie des permis et procédures imposés par la loi. La procédure d’EIE ne consiste pas en une seule intervention mais constitue un processus itératif qui se poursuit sur toute la durée des activités de la société. En raison de leur coût élevé et du fait qu’elles peuvent limiter les possibilités d’exploitation des sociétés, elles sont souvent fictives ou ignorées. Dans certains pays, comme l’Indonésie, la violation des lois relatives aux EIE est considérée comme un délit pouvant donner lieu à une peine de prison pour les coupables. Ainsi, un processus d’EIE peu fiable peut miner la légalité du droit d’exploiter.Quand ils sont obligatoires, les accords sociaux signés entre les sociétés et les communautés peuvent constituer une autre forme de procédures et droits qui sous-tendent le droit d’exploiter. Ils sont par exemple obligatoires en RDC où les sociétés enfreignent régulièrement les termes des clauses sociales inclues dans le cahier des charges des contrats de concessions forestières. Afin d’accroître le retour sur investissement pour le pays d’origine, les contrats d’exploitation forestière imposent souvent aux sociétés forestières des obligations de construire des scieries ou de transformer un certain pourcentage de grumes récoltées. Ces obligations sont également généralement ignorées.Les coupes hors limites Déboiser ou récolter du bois en-dehors des limites d’une concession est pratique courante. Dans de nombreuses zones forestières reculées les limites des concessions, quand elles existent, sont mal tracées et le respect de ces limites définies dans les permis ne sont pas minutieusement examinées par les autorités.L’évasion fiscale Les sociétés d’exploitation forestière sont habituellement assujetties à des taxes forestières spécifiques. Ces dernières prennent souvent la forme d’une taxe calculée sur la base de la surface sous contrat ou gérée par la société, et d’une taxe portant sur le volume de chaque essence récoltée. Souvent, le processus pour calculer le montant des taxes à payer dépend d’un inventaire forestier réalisé soit par les sociétés elles-mêmes, soit par des fonctionnaires qui manquent de ressources. Ces failles et lacunes dans la surveillance permettent aux sociétés de minimiser les impôts qu’elles doivent payer, ou leur permettent de ne pas en payer du tout, ce qui rend illégal le bois récolté. Les sous-déclarations des volumes sont monnaie courante en Amérique latine, en Afrique et en Asie. La fausse déclaration des essences est une autre pratique courante consistant à remplacer, sur les documents officiels, les essences rares de forte valeur commerciale avec des essences de moindre valeur. Lorsque des sociétés défrichent des terres sans les permis leur permettant de vendre le bois à des fins commerciales, comme c’est fréquemment le cas en Indonésie, le produit n’est pas déclaré et échappe ainsi à toutes les taxes au point de récolte. Cette pratique peut être même plus complexe et en RDC des observateurs ont affirmé que des sociétés d’exploitation forestière avaient négocié avec le gouvernement des accords illégaux leur permettant de ne pas payer des taxes
6. L’enquête sur la récolte: l’analyse sur document
7. L’enquête sur la récolte: les recherches sur le terrain
8. Le transport, la transformation et le commerce du bois
9. L’enquête sur le transport, la transformation et le commerce
Des mesures devraient être prises pour que l’identité réelle des enquêteurs ne puisse pas être découverte. Ces derniers ne devraient utiliser ni leur vrai nom, ni leur adresse e-mail ou leur numéro de téléphone personnels. Il convient de bien noter toutes les communications ayant eu lieu avec les sociétés et les données obtenues par ce biais devraient être cataloguées avec soin pour référence ultérieure. Pour les méthodes qui peuvent être utilisées pour enregistrer les interactions ayant lieu sous couvert, voir L’enregistrement clandestin de preuves.
10. Le suivi en aval jusqu’au marché final
Le point de départ : le point d’exportation ou le marché
Il existe deux méthodes pour établir les liens entre le bois illégal dans le pays d’origine et le pays de destination : le suivi à partir de la source et le suivi à partir de la destination :
Il peut être nécessaire et fructueux d’employer les deux approches. Par exemple, si les efforts pour suivre la chaîne d’approvisionnement d’un produit spécifique à partir du pays d’origine s’avèrent inefficaces, il pourra être nécessaire de se rabattre sur l’approche consistant à faire le lien avec la même chaîne d’approvisionnement en suivant les produits concernés en remontant vers le pays d’origine.
Jusqu’où suivre la chaîne d’approvisionnement? Jusqu’où retracer la chaîne d’approvisionnement dans le pays consommateur, après l’importation, dépendra de la loi utilisée et du but des recherches. Dans l’UE, l’élément clé du RBUE ne s’applique qu’aux sociétés qui vendent le produit dans l’UE pour la première fois (le « premier à mettre sur le marché »).[i] Aucune mesure ne peut être prise à l’encontre de sociétés se trouvant plus loin le long de la chaîne d’approvisionnement. Toutefois, il peut être utile de mener des recherches plus loin afin de « dénoncer et blâmer» d’autres sociétés achetant du bois auprès du premier à mettre le produit sur le marché. Si les recherches commencent à partir du marché, il se peut que l’identification des importateurs de certains produits ne puisse se faire qu’en remontant la chaîne d’approvisionnement à partir des détaillants.11. L’évaluation des preuves
Prochain: Etudes de cas